La plage, le culte, l’accident et la criée

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Un dimanche nous sommes allés à la Gorgette, jolie petite plage, à 1 h. de Sanary, où nous avons « pique niqué ». Deux autres nous sommes allés au culte évangélique organisé dans une maison démontable par l’église méthodiste épiscopale. Le culte était tenu par l’évangéliste titulaire, habitant à Ollioules (station de Sanary) ; c’était un Mr Juillard que ma femme avait connu autrefois alors qu’il était agent de la Croix-bleue au Jura bernois. J’ai fait le second à sa demande et ai prêché devant une quinzaine de personnes sur « Nous sommes ouvriers avec Dieu ». Mon père qui l’aurait aimé et m’avait beaucoup engagé à accepter de faire cette prédication n’a pu y assister. Il s’était en partie coupé un des jours précédents le bout d’un doigt, le majeur de la main droite, qui avait été pincé dans une chaise pliante. On faillit même lui couper le bout de ce doigt, le dimanche matin, une heure avant ma prédication, on lui en arrachait l’ongle. Pauvre cher père, combien j’ai admiré sa patience et combien je me suis fait du bien, un jour que nous étions en tête-à-tête dans la pinède, en l’entendant me parler de ses convictions évangéliques, de son assurance du Salut, de son absolue confiance en Dieu… Avant son accident, c’était lui qui chaque matin, quelques fois, avant déjeuner, afin d’avoir du poisson, allait faire les achats du ménage, allait à « la criée », vente aux enchères des fruits et des légumes. Très typique, avec le langage du « crieur » auquel il faut s’habituer. C’est moi qui remplaçai mon père. Un jour avant 7 h., j’eus l’occasion de voir ce que c’était qu’un endroit où il n’y a pas d’égout, et où le tonneau passe chaque matin prendre le contenu des seaux hygiéniques placés devant les maisons. L’odeur était telle que mettant mon mouchoir sous mon nez, je pris littéralement mes jambes à mon cou, tandis que ma chère femme me suivait aussi vite qu’elle le pouvait.