Avoir 20 ans à Nouméa dans les années 20

Lettres de Marie-Alberte Crane à son amie Irène Sandoz, à Neuchâtel

Avoir 20 ans à Nouméa dans les années 20

Les lettres relatives à cette migration en Nouvelle-Calédonie sont dues à la plume de Marie-Alberte Crane. Cette jeune Française a été reçue pendant la guerre, en 1918, par la famille du vétérinaire Henri Sandoz de Neuchâtel et semble s’être assez liée d’amitié avec une des filles de celui-ci, Irène Sandoz, pour lui écrire avec une certaine régularité entre 1918 et 1923. Seize lettres et cartes postales ont été conservées.

La famille Crane regagne la France à la fin de la guerre, en décembre 1918. Les lettres que Marie-Alberte Crane envoie de Nantes (où elle passe des vacances) et de Paris, entre le 22 décembre 1918 et le 10 septembre 1920, sont révélatrices des petits bonheurs et menus soucis d’une jeune fille de famille aisée. Vacances, promenades au Jardin d’acclimatation ou au Jardin des plantes, visite des catacombes de Paris, naissance de canards au parc Montsouris, sorties, étrennes, santé, maladie de la grand-mère, cours, préparation de son brevet (elle sera reçue en été 1920)…

Marie-Alberte est la fille d’André Crane, appelé à se rendre comme officier d’infanterie coloniale en Nouvelle-Calédonie, et de Jeanne Josèphe Richaud. La jeune fille ne souhaitait pas ce départ pour l’outremer. Le voyage lui fait envie, mais la perspective de rester trois ans à Nouméa lui donne « un cafard monstre » (lettre du 10 septembre 1920). En fait, elle fera sa vie en Nouvelle-Calédonie où elle se marie avec un cousin le 28 juillet 1928.

André Solier président du Centre de généalogie de Nouvelle Calédonie, écrit le 22 avril 1990 à propos d’André Crane : ... par ma famille j'ai su l'histoire d'un Monsieur Crane qui avait assisté à une décapitation, suite à un jugement des tribunaux. Il avait été tellement choqué qu'il mourut très peu de temps après (1927). Je l'ai su par ma grand-tante qui était mariée à Maître Gaston Bourdinat, avocat défenseur à Nouméa, qui lui-même connaissait très bien Monsieur Crane... Ma grand-mère a connu un Monsieur Crane qui était bien officier de l'armée à Nouméa. (Cité dans www.ghcaraibe.org/articles/2016-art31.pdf - consulté le 28.11.2017)

C’est à bord du bateau "El Viautara" que la famille Crane se rend à Nouméa. Le départ est fixé au 20 octobre 1920. Après avoir essuyé tempête sur tempête, la famille Crane arrive à Nouméa le 6 janvier 1921. Elle est accueillie par des cousins qui résident là. Il s’agit d’une veuve, Mathilde Eugénie Elvire Colardeau (née Rivière), et de ses cinq enfants : Fernand Colardeau, 1895-1972 ; Edmond Colardeau, 1896-1945, Madeleine Colardeau, 1897-1985, James Colardeau, 1899-1952 – qui épousera en 1928 Marie-Alberte Crane – et Paule Colardeau, née en 1901. Le père de famille, Lucien Colardeau (1868-1916), avocat et président du Conseil général de Nouvelle-Calédonie, avait acquis une immense propriété aux Nouvelles Hébrides (la Caféterie Colardeau).

La famille Crane possède une maison avec un parc et a quatre domestiques à son service. Marie-Alberte Crane mène à Nouméa la vie privilégiée et insouciante d’une jeune fille de fonctionnaire colonial, dont on n’attend pas qu’elle entreprenne des études pour exercer plus tard un métier, ce qu’elle semble d’ailleurs regretter dans une de ses lettres.

Les lettres et les photographies envoyées par Marie-Alberte Crane à Irène Sandoz sont extraites du fonds Claire Pagni.

 

Table des matières

Premières impressions de Nouméa

"La vie est toujours la même ici..."

"Le premier de l'an approche et j'ai beaucoup de cadeaux à préparer..."

"Me voilà au bout de ma lettre et je m’aperçois que mon papier n’est pas extensible..."